mardi 21 octobre 2014

RUPTURES

   Les ruptures sont une figure obligée de l' existence. Ne serait-ce que par la mort. Parents,  proches, amis : autant de séparations, précoces, brutales... Dans la vie amoureuse, c' est devenu une banalité, une formalité du quotidien. Relations à peine naissantes se rompent, sous l' exigence de l' un à l' autre, dans la quête improbable du plaisir : le règne de l' individualisme qui ne supporte et ne pardonne rien.

   Il n' y a guère qu' en art que la rupture n' existe pas. Les "révolutions " littéraires, picturales... ne font qu' imiter à l' envers ce qu' a fait le mouvement précédent. Faire le "contraire " de ce qui a précédé est faire à l' identique... d' une autre manière. Où est la rupture entre Shakespeare, Hugo, Verdi... ? Trouvez - moi autre qu' une ligne directe entre impressionnisme, pointillisme, cubisme, abstraction ?

   En politique, c' est un peu la même chose : qui peut nier que la féodalité tsariste a beaucoup pesé sur le régime soviétique? En France, le mot  " rupture " fait partie des récurrences du discours politique. Pas   seulement. Ainsi, la gauche française a une tradition historique de la rupture, moins avec le capitalisme d' ailleurs qu' en son sein. Les grandes ruptures à gauche se sont produites sur des sujets qui en valaient la peine. Le Front Populaire a explosé  ( c' était l' époque ! ) sur l' enjeu décisif, on l' a vu plus tard, de la Guerre d' Espagne. Plus tard, l' Union de la Gauche s' est désunie sur le niveau de réponse au capitalisme en mondialisation. En ces des deux occurrences, je n'ai pas honte de mon parti, le P.C.F..

   Aujourd' hui, le Front de Gauche est - il lui même au bord de la rupture ?  Je ne reviens pas sur le conflit qui a conduit à cette situation. Sur ce point, je me suis déclaré sans timidité  ( je n' en ai qu' avec les femmes ! ). Je n' y reviens pas. Simplement, je considère que le différend n' est pas du niveau des  historiques. Evidemment, face au glissement progressif du P. S. vers le plaisir libéral, les balancements successifs du PCF entre sa radicalité et ses alliances électorales et gouvernementales  ( pour résumer : entre le départ de 83 et la participation à la Gauche Plurielle, par exemple )  n'ont pas contribué à la clarification politique. Mais cela n' exonère pas les volontiers donneurs de leçons, ceux qui, comment dire : ont mis un certain temps à s' extraire de l' enlisement socialiste, sans parler de ceux qui encore parviennent mal à franchir le seuil.

   En fait, il  y a  une rupture qui ne s' est pas réalisée dans le Front de Gauche. C' est celle de l épreuve de force entre volontés de domination et de direction du mouvement, à l' occasion de ces municipales et des européennes qui ont suivi, dans un bras de fer évoquant tristement les années 80, encore un fois en moins noble. Si bien que je me demande si notre pays, à la différence d' autres en  Amérique Latine, est vraiment fait pour la forme front.

   Inévitablement, une construction politique en fragilité ne pense qu' à s' élargir... C' est bien. Mais il est indispensable que le vaste rassemblement observe ce que le FDG n' a tenu qu' un temps: l' acceptation des priorités d' engagement divers, les degrés de RUPTURE avec le capitalisme, la recherche patiente des convergences et la réduction des différences... Je veux bien être de l' affaire.... mais pas pour refaire l' Histoire.

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