LA MÉDITERRANÉE ne manque pas de figures féminines mythiques. Pourtant, piètre sort est réservé aux femmes dans cette région du monde. Otages de la tradition, de la religion, des politiques les plus rétrogrades, elles sont, depuis de nombreuses décennies, aux premières lignes des tourments qui secouent les pays méditerranéens. Qui se souvient encore de Yasmine Drissi, première figure féminine de la presse algérienne à être assassinée le 11 juillet 1994 par des islamistes ? Que connaît-on du quotidien courageux des femmes kurdes, syriennes, palestiniennes, libyennes ? Qu' évoque pour nous le nom de Shaima Al-Sabbagh ? Jeune Égyptienne, tombée le 24 janvier dernier sous les balles assassines de la police. Militantes, féministes, mères, filles, femmes tout simplement ? Force est de constater que, dans les sociétés en lutte pour l' émancipation de tous, elles sont toujours en premières ligne des combats et des sacrifices. En décembre 1989, dans un hommage adressé aux femmes, le plus féministe d' entre nous, Kateb Yacine rappelait le message de la Kahina, la princesse berbère : " Ils s' étonnent de vous voir dirigés par une femme. C' est qu' ils sont marchands d' esclaves. Ils voilent leurs femmes pour mieux les vendre. Pour eux, la plus belle fille n' est qu' une marchandise. Il ne faut surtout pas qu' on la voie de trop près. Ils l' enveloppent, la dissimulent comme un trésor volé. Il ne faut surtout pas qu' elle parle,qu' on l' écoute. Une femme libre les scandalise. Pour eux, je suis le diable ". Pour elles, pour eux, pour nous, osons l' impertinence ! Osons la féminité !
Yasmina Touaibia
Docteur en science politique, spécialiste de la Méditerranée,
Université de Nice-Sophia Antipolis,
Avocate au Barreau d' Alger;
in PATRIOTE COTE D' AZUR
Semaine du 6 au 12 Mars 2015
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