Jamais un appareil gouvernemental socialiste ne s' était en aussi peu de temps embourbé, envasé dans une impopularité sans recours dont profitent les secteurs les plus réactionnaires de l' opinion, des élites, des forces politiques. En fait, tout était dit avec l'
ANI et les premiers agenouillements devant les froncements de sourcils du moindre lobby patronal. Il est vite devenu évident que le pouvoir était exercé par des libéraux plus libéraux que les libéraux
de souche. Plus le zèle ultra - atlantiste, le syndrome Suez, ce qui faisait parler Mauriac, dès 1956, " d' un ministère qui exécute les besognes que le pays ne souffrirait pas d' un gouvernement de droite ". On appelle cela le " consensus ". Le pays ne le supporte plus, non plus, d' un gouvernement classé à gauche... Si bien que devant l' accumulation, on songe à : " comment peut - on être au P. S. ? ", proche, membre, militant quand on est de ...gauche ?
C' est que nous tous les hommes sommes d' étranges créatures... et quand je dis " les hommes ", je ne fais pas de distinction avec les femmes dont le cher Molière fait dire à un de ces personnages : " ces drôles d' animaux - là ". Je connais trop l' ami Poquelin pour ne pas imaginer qu' il aurait pu écrire en fait la même chose de la part masculine de l' humanité. C' est bien cela l' humanité : l' effort permanent de surpasser la peur de l' autre, l' enfermement sur ce qu' on imagine sa liberté, le besoin quasi - animal de défenses en caricaturant celui dont on fait son adversaire. Tout ce qui domine notre époque. Et qui fait le recours à une famille, un parti, une Eglise comme protection et rassurance.
Je vais rester dans l' esprit de mon dernier texte " culinaire ", le domaine de l' intime. Même si je n' ai aucune pudeur, je promets de ne pas poursuivre trop longtemps sur ce chemin pour ouvrir au politique. Mais, après tout, j' ai soutenu le candidat à la présidentielle qui, dans ses discours de campagne, ne manquait jamais de parler d' amour comme donnée essentielle de la vie et de la politique.
Donc, je me suis sidéré hier... Je regarde à l' improviste la femme que j' ai aimée ou cru aimer, après une séparation sans ménagement et, quelquefois, à la limite de la dignité, y compris de mon côté...et une montée de tendresse me prend, alors que je n' éprouve plus de vrai désir, mais à l' image sans - doute, incontrôlée, de moment privilégié passé. Et là je me dis que si elle faisait
un pas, j' en ferais immédiatement
deux, tout en sachant par derrière la tête qu' il n' y en aurait pas
trois. " Etonnant, non ? " aurait dit Desproges...
Et c' est là que je pense à mes proches, mes amis de " sensibilité socialiste " qui ne sont pas si éloignés de moi par les aspirations à la justice, aux libertés, à la culture. Je les connais assez pour savoir qu' ils ne sont pas de gauche par simple confort intellectuel, pour les soupçonner de bonne conscience, d' absence de volonté ou de courage... Je comprends : les relations à son parti, au groupe, aux " camarades " sont aussi d' ordre affectif. Et quand bien même rester est impossible, la rupture est trop douloureuse. Mais enfin pour un socialiste de vérité le dernier moment privilégié, c' est quoi ? Le Panthéon en mai 81 ? Ca commence à dater non? Et il s' est passé tant de choses par après...
Nous sommes face à une situation où chacun est face à ses responsabilités... Je pense, j' espère que les socialistes ...socialistes ne s' y déroberont pas aux Municipales et aux Européennes pour ouvrir une issue à gauche. Beaucoup dépend d' eux...